Sexisme au travail : une médiatisation croissante depuis 2017
Dans le prolongement des révélations qui se succèdent depuis l’affaire Weinstein en 2017, la recrudescence et la médiatisation de faits de violences sexuelles et sexistes au travail ont amené plusieurs secteurs économiques à se mobiliser.
En réaction, certaines organisations professionnelles telles que le Centre National du Cinéma et le Centre National de la Musique ont décidé de conditionner leurs aides à la mise en place par leurs adhérents de plans de formation spécifiques.
Pourtant le monde du travail n’avait pas été originellement repéré par le législateur comme prioritaire.
Sexisme au travail : des mesures législatives récentes
Ce n’est qu’en 2019 que l’obligation a été faite aux employeurs de nommer un référent harcèlement sexuel dans les Comités Economiques et Sociaux de toutes les entreprises.
Dans le même temps, le gouvernement annonçait la nécessaire formation des inspecteurs et médecins du travail sur ces questions.
Des dispositifs encore à évaluer
Ces mesures sont-elles opérationnelles ?
Seront-elles suffisantes ?
L’attente créée par la médiatisation de ces sujets est en effet immense. Quelles leçons peut-on réellement tirer des 20 années qui se sont écoulées depuis la première enquête française sur les violences faites aux femmes en 2000 ?
20 ans de lutte contre les violences faites aux femmes, pour quel bilan ?
Sexisme au travail : 20 ans de lutte pour quel bilan ?
1992 : Première reconnaissance légale du harcèlement sexuel
1992 : Le harcèlement sexuel entre dans le code pénal et dans le code du Travail en 1992, dans une définition assez restrictive. Cette définition a régulièrement évolué depuis.[1]
2000 : Une première enquête nationale
2000 : Première enquête française concernant les violences faites aux femmes (ENVFF). Elle est diligentée pour répondre aux recommandations faites aux gouvernements lors de la Conférence mondiale sur les femmes à Pékin en 1995 «de produire des statistiques précises concernant les violences faites aux femmes ».
2004–2009 : Des outils pour lutter contre les violences domestiques
Entre 2004 et 2009, des outils juridiques se sont mis en place, principalement pour lutter contre les violences domestiques dont sont victimes les femmes (Accès prioritaire à des centres d’hébergement, dispositifs judiciaires pour écarter le conjoint violent, mise en place du 3919, …).
2012 : De premières sanctions dans le monde du travail
À partir de 2012, des dispositions spécifiques au monde du travail sont édictées (pénalités pour les entreprises qui ne respectent pas les obligations en matière d’égalité professionnelle, notamment).
2015 : Introduction du concept d’agissements sexistes
En 2015 est introduite dans le code du travail une disposition visantles agissements sexistes, à l’article L1142-2-1 :
« Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. »
2017 : Création du Haut Conseil à l’Égalité Hommes Femmes
En 2017, le Haut Conseil à l’Egalité Hommes Femmes est inscrit dans la loi, avec pour mission de remettre chaque année un rapport faisant l’état des lieux du sexisme en France. L’affaire Weinstein éclate aux Etats-Unis.
Sexisme au travail : un rapport encore incomplet en 2019
En 2019, le Haut Conseil publie son premier rapport qui fait très peu état des violences sexuelles et sexistes au travail, ne reprenant aucune donnée chiffrée sur cette dimension.
Le rapport décrit simplement des agissements sexistes au travail :
« Le sexisme contribue à disqualifier les femmes, sous des formes variées. Au-delà des phénomènes de discrimination au travail et des violences sexuelles (harcèlement sexuel, agression sexuelle), six manifestations principales de sexisme dit « ordinaire », c’est-à-dire d’agissements sexistes, ont été identifiées :
- Les blagues sexistes
- La police des codes sociaux de sexe ou l’obligation de se conformer aux stéréotypes et rôles sociaux de sexe
- Les marques d’incivilité, de condescendance et de mépris (dont le manterrupting ; le mansplaining)
- La fausse séduction
- Le sexisme bienveillant
- Les remarques désobligeantes sur la maternité. »
Il est aussi fait mention d’un « Kit pour agir contre le sexisme au travail », publié en 2016 par le Haut Conseil à l’Egalité professionnelle Hommes-Femmes.

[1] Pour un panorama complet de la législation, qui ne constitue pas l’objet de cet article, voir http://respectees.cfdtparis.com/Harcelement-sexuel-Le-droit